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Marc Ducret Trio+3 - Métatonal

Nicolas Dourlhès, CitizenJazz *ELU*

La grandiose mais âpre tétralogie des Tower (augmentée du double live Tower-Bridge) aurait pu laisser penser que ce nouvel enregistrement de Marc Ducret constituerait une sorte de récréation mais il n’en est rien. L’exigence musicale est toujours au rendez-vous même si le territoire à défricher s’est sensiblement déplacé. Se détachant immédiatement de ces cinq pistes recueillies en public (par Matthieu Metzger), les reprises éclatantes de Bob Dylan (« The Times They Are A-Changing » et « Wigwam » rassemblés en un seul morceau) découvrent, en effet, une facette moins coutumière de l’univers du guitariste et éclairent l’ensemble par leur tonalité enjouée et colorée. Pourtant au-delà de ces réminiscences parfaitement assimilées à cette culture populaire d’où Ducret est issu (un autre clin d’œil figure sur la pochette…), Métatonal est un disque où la six-cordes trône en majesté dans toute sa diversité stylistique. Débordant d’une énergie folle, il finira certainement d’imposer son auteur comme un des chefs de file des musiques aventureuses. Particulièrement avec ce trio qu’il conduit depuis une quinzaine d’années.

Car les temps ont effectivement changé depuis l’époque où, faute d’avoir pu trouver un label, le trio enregistrait en autoproduction (c’était en 2006) et où Ducret, excédé, partait s’exiler au Danemark. Le cap est resté le même et cette machine électrique redoutable qui est parvenue au fil du temps à résoudre l’équation entre la puissance du rock le plus percutant et le jazz le plus audacieux donne aujourd’hui à entendre toute la richesse de vocabulaire de ce musicien ainsi que toute sa grammaire.

Renouant avec un jeu guitaristique mis en retrait sur les dernières productions, les phrasés véloces bousculent la logique sans jamais la renier, sollicitant rythmes et harmonies dans une succession de fulgurances qui semble intarissable. Tour à tour galvanisante comme sur “Dialectes” ou d’un humour grinçant comme sur “Inflammable”, la construction des morceaux est faite d’un assemblage de décharges brûlantes, contrastées brusquement par des périodes atmosphériques noires qui se cristallisent autour d’un thème explosif grouillant de lignes sinueuses.

Mais il serait injuste de tout centrer sur le seul Ducret. Que ce soit la frappe omniprésente d’Eric Echampard qui soulève des lames de fond ou la basse de Bruno Chevillon solidement arrimée au temps, plus qu’un soutien indéfectible, ces fidèles lieutenants sont les rouages indispensables à l’ensemble. Ajoutez une section serrée de soufflants qui ponctue les riffs du guitariste d’angles saillants et d’impacts cuivrés ; les trois invités qui la constituent sont aussi bien des dessinateurs abstraits (Fabrice Martinez notamment sur “Kumiho”) que des ferrailleurs flamboyants (Christophe Monniot également sur “Kumiho”).

Attention, tirage limité à quelques centaines d’exemplaires.